Chapoullié Blog

Le livre qui ne voulait pas s'effacer

Saris en phares

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Image frontale, voiture, nuit, phares éblouissants, une scène de film, de Godard, de face, de polar, mais de la couleur, mais des saris, des regards, peau, qui est intimidé ?

Dans une ferme du Tamil Nadul, août 2012.

A la recherche des senteurs. Avec Thierry Wasser, pour Guerlain.

Belle au sein machine

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Belle, sein, machine, mécanisme, belle, retrouvée, Marseille 1990, Genève 1996, Paris 2011.

Ils dansent ensemble…

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Christine et Éric.

Ils ne sont pas amants mais ils dansent ensemble.

Chacun d’eux sait combien sa confiance en l’autre, en ses gestes, les réceptions comme des embrassades, les sauts, les courses, est sœur de l’abandon amoureuse. Ils l’ont si souvent ressenti.

Lorsque je retrouve cette photo, je revis cette émotion si pleine qui parcoure toutes les coulisses d’un théâtre, au noir, alors que la salle est déjà pleine de l’attente du public, qu’on est comme dans l’ombre si excitante d’une cabane d’enfant, ravi d’être si bien caché, je sais que je ne suis pas un danseur, je suis un invité, un ami qui se glisse tout près, que je ressens  ma chance d’être dans cette intimité si fragile et si dense, je ressens moi aussi le trac et l’excitation. Eux, se préparent à se laisser aller ce soir encore à la confiance absolue. A la voir, on comprend qu’elle s’en amuse, elle le défie tendrement, elle sait comme il est doux. Lui est si calme, il aime rassurer. Moi je sais que déjà ils s’abandonnent, je vois la lumière en face qui les transpercent, c’est déjà le spectacle.

Pendant ce temps on entend le public s’installer, comme un orchestre qui s’accorde, un animal qui frissonne.

C’était en 1996, alors lors de la tournée du spectacle Decodex de la compagnie DCA, au théâtre de Chambery. Avec Christine Bombal et Éric Martin.

Princesse au vétiver

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Une princesse, sur les épaules de son grand-père, tout au fond, tout au bout, d’une vallée du Tamil-Nadul, un brin de vétiver odorant dans la main.

Elle est sortie tout droit des pages d’un livre d’images, histoire d’une petite princesse adorée de sa famille, tout au fond du royaume, plutôt oublié de tous, où l’on habille encore royalement les petites filles dans les champs de vétiver.

India. Tamil-Nadul. 2012. Avec Tierry Wasser pour Guerlain.

Fête de la musique

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Un miroir. Un violoncelle. Un serpent. Une danse. Un manche de violon sur un corps de violoncelle, ces fameuses hanches du surréalisme, du symbolisme, de tout les ismes, un manche de Rickenbacker, une des icônes de mon adolescence, des discussions sans fin autour d’un café à 1 franc, entre deux flippers, sur les mérites, supposés, de la Strato d’ Hendricks, impériale malgré que gauchère, ou de l’exotique Rickenbacker des Beatles, je n’oublie pas la SG une explosion d’ombres et de lumières sur un fond de cyclo, des bouts de cartons pièges à formes qui ne se savaient pas installations, bien trop précoces, des anamorphoses dans un quotidien qui n’imprimait qu’en N&B, commande Libé pour un cahier spécial Fête de la Musique 93, la couleur que je n’ai réimplanté qu’ensuite, c’était aussi une évidence, en tâtonnant sur mes négatifs, dans la chambre noire, solitude qui ne savait pas qu’elle se préparait à se livrer aux bits du numériques et de l’écran.

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Je ne savais pas ce que cela préfigurait, ce n’était pas plus difficile à faire et imaginer, seulement terre inconnue, seulement beaucoup moins accepté, et surtout reconnu en cet âge du Noir et Blanc triomphant.

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6. La mère, le linge et le nuage.

Little Karoo.

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C’est la route. Les routes qui une fois passé les cols s’enfoncent rectilignes dans le bush. Vers l’est, la piste des trekkers.

La quête de l’Est cette fois, un western à l’envers, un western quand même, ses pionniers, sa civilisation en marche, son évangélisation, ses bons et mauvais sauvages, à soumettre au nom de Dieu, du progrès, toute cette histoire qui flotte encore dans ces paysages brulants.
Ce sont les mêmes routes, pistes qui s’enfoncent dans le bush. Les fenêtres ouvertes, l’air en fusion qui tourbillonne dans la voiture, la fascination d’avancer sans limites. Loin, avec toujours un horizon à atteindre, et encore un autre qui se dessine.

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Pas facile de trouver sur la radio les chants zoulous ou les gospels de Ladysmith Black Manbazo, mieux vaut emporter ses propres munitions, ce que je comprendrais vite. On a beau être en plein bush, c’est la variété et le rap sucré Us qui s’est fait sa place.
Malgré les recommandations, une bonne manière de faire des rencontres est bien de prendre des voyageurs en stop. Des familles entières parfois, qui ont attendues le bon vouloir d’un conducteur, ou qu’un bus collectif se décide à passer par là. Bonne manière aussi de se sentir utile.
Les premiers moments dans la voiture sont tendus : tout le monde se craint. Aucun geste n’est gratuit, habituellement. Il faut s’apprivoiser, chacun dans méfiance, chacun peut être le risque.

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Au bout de la piste, une ferme isolée, qui s’appellera quelque chose fontein, car il faut un peu d’eau pour vivre ici. Je pense aux cabanes en rondins de la conquête de l’Ouest, mais ici il n’y a pas de bois. Les maisons sont de terre. On ne peut pas aller plus loin, et quand on s’approche, il faut faire attention à ne pas effrayer, on est l’étranger. Celui qui pourrait apporter le danger.
Et cette mère qui étend son linge, devant cette immense plaine est si paisible.
Le baluchon qu’elle porte n’est pas du linge, non, c’est son bébé.

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5. Et les petites écolières.

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Sortie scolaire avec casse-croûte sous les délicieux ombrages des allées du jardin botanique de Cape Town. Premières notions de science de la vie et de la terre.
Une classe, mixte maintenant, et dans tout les sens du terme. Ce qui n’était pas le cas il y a peu encore.
Ce petit garçon malicieux le sait bien, même s’il n’était qu’un minuscule bambin à la fin de l’apartheid. Il sait que sa présence ici, dans cette classe, ce quartier, cette école, est encore bien incongrue pour beaucoup, voir incorrecte. Et il s’en amuse. Son geste taquine. Ses chaussettes tire-bouchonnées taquinent. Sa chemise, son pansement, les chaussures percées à la Chaplin….
Et cette conscience aiguë, étonnante vu son âge, comme une jubilation, fait plaisir à voir.
Un geste me qui dit « T’as vu ou je suis !! Moi aussi ! C’est dingue, non !? «
Un gavroche austral.

4. Dimanche après-midi.

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A l’arrière de la montagne, Mitchell’s Plains. La, se trouve les Métis, les Coloureds, une communauté de sang mêlés que l’on ne retrouve qu’au Cap, mélange de Malais, Blancs, Noirs, Arabes, Indiens, trois siècles d’unions pas toujours clandestines. Nécessaires et même favorisées paraît-il, mais ça il y a longtemps….
Comme partout dans le pays, on ne se sent en sécurité que si on reste strictement dans son espace géographique. Alors, le dimanche, pour les habitants de Mitchell’s, c’est pique-nique sur la plage, mais sur celle-la, celle qui se trouve tout au bout de leur quartier. Quartier à traverser de part en part si on veut y parvenir, une vraie frontière naturelle donc.

Passée la suprise de voir arriver un étranger, – inconscient ou provocateur ? … Ah non, un overseas, alors welcome ! Welcome dans la torpeur du dimanche.

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3. Le père fier de Bonne Espérance

Une tradition parfaitement sud-africaine : prendre l’apéro en profitant de la beauté des paysage, particulièrement au moment du coucher du soleil, mais pas seulement…

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Prendre une, ou plusieurs voitures suivant le nombre de participants, chargées de glacières, bières, vins blancs et sodas, et choisir une aire de parking avec vue imprenable.
Dans ce pays ou tant de clôtures et murailles enferment l’horizon, c’est un plaisir nécessaire.

Le chic absolu ici, c’est qu’on est devant le cap mythique de Bonne Espérance. A le toucher, ce rocher qu’on aperçoit la en arrière plan. Pèlerinage obligé.
Une excellente façon de célébrer la bonne arrivée de ses deux jumeaux qui remplissent de fierté l’heureux père.

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Difficile de choisir meilleur symbole protecteur pour bien débuter dans la vie. On ne peut que leur souhaiter la Good Hope de l’esprit des lieux. Pour ma part la meilleure des rencontres en ce lieu légendaire.

2. Elle rentre chez elle.

Crossroads milieu d’après midi.

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Elle rentre sans doute du travail, de l’autre côté de la montagne, dans le centre ville.
Impossible de la laisser passer, sans lui demander de bien vouloir poser. Elle est si élégante.
C’est comme de faire une photo de mode. Mais une vraie, sans retouche. Elles est belle.
Derrière elle, le vent, les barbelés et les sacs en plastiques, scénographie sud-africaine.

Devant, face à la mer, la ville blanche, la baie, les malls, le down town à l’américaine, les plages, la corniche avec ses villas superbes le long des chaines de montagnes léchées par des nuages langoureux, surplombant la mer. Derrière, le long de la route qui mène à l’aéroport, cette route qui ouvrait vers la conquête du pays, sépare les quartiers réservés aux Coloureds depuis les temps de la ségrégation. A droite Gugulethu , Crossroads, Nyanga, townships de bric et de broc, quartiers essentiellement habités par les communautés noires. En face, des bâtiments en dur, les quartiers des Métis du Cap. Un peu plus loin encore Khayelista, immense agrégats de township ou se trouve nombres des communautés noires qu’on appelle les squatters, les « Out Of South-Africa » venues des autres pays d’Afrique, et le plus souvent rejetées.

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Des champs cultivés au bout de la piste de l’aéroport, des potagers. Les réacteurs hurlent juste au-dessus, les avions sont à quelques centaines de mètres au-dessus. Difficile à imaginer, lorsqu’on regarde cette photo qui semble bien paisible et champêtre. Une sorte d’Angélus des townships.